Colloque de Lubumbashi- Gouvernance des Provinces en RD.Congo
Intitulée : "Socio-Anthropologie foncière et gouvernances des identités criminelles dans les Provinces de la RD. Congo : dynamiques de populations, enjeux sécuritaires et perspectives des gouvernementalités".
Avant d'annoncer que le plan de sa communication comportait 6 points suivants : (i) les sources méthodologiques de ses données, (ii) la conclusion de sa conférence, (iii) les faits socio anthropologiques, socio-politiques et socio-économiques fonciers, (iv) la crise de la gouvernance identitaire et les bizarres gouvernementalités collectives en l'absence d'une politique de la population dans un État de 2.345.410km, (v) l'état de l'État, les tendances générales et les perspectives quant à l'avenir de l'État dans une société en crises perpétuelles et (vi) que devrait être une introduction?
Le Secrétaire scientifique de l'Observatoire de la Gouvernance a tenu à préciser que (i) le Colloque devrait prévoir un panel sur les débats théoriques, conceptuels et épistémologiques de la Gouvernance et des Gouvernementalités puisqu'il a constaté que la majorité des communications s'étaient intéressées sur la gestion publique, le management public, les politiques publiques, la de délivrance des services publiques et s'inscrivent généralement dans le paradigme moderniste (20ème siècle), pourtant, on est dans l'ère postmoderne.
En plus, réagissant à l'affirmation du Professeur André Mbata selon lequel "il n'existe pas assez des travaux sur la gouvernance locale", Michel Bisa a renseigné qu'au sein de l'observatoire de la Gouvernance, tous les travaux conduit relèvent de la Politologie appliquée et se concentrent sur la gouvernance locale, participative et les gouvernementalités parallèles, alternatives, pratiques et, même, contradictoires. Peut-être que c'est la vulgarisation qui pose problème. Pour lui, ces thématiques sont mêmes devenues des classiques des sciences sociales en générale.
En deuxième regret, Michel est revenu sur le manque du respect au temps, pour les panels du premier jour ce qui fait que ceux qui attendaient sa conférence en directe sur les plateformes virtuelles bisarecherche, à 11heures, n'ont pas pu le suivre à 17 heures de Lubumbashi.
Des sources méthodologiques de ses données
Les données présentées par Michel Bisa découlent principalement de trois études empiriques complémentaires réalisées avec trois équipes différentes à savoir (1) les enquêtes socio-foncières dans les Provinces du Sud-Kivu, Kwilu et Kinshasa, (2) l'étude CEMiC-Climat-Eau-Migrations et conflits réalisées dans le cadre du CRREBaC, sous la codirection avec Raphaël Tshimanga et Bernard Lututala, dans la partie Nord-Est (Bas-Uélé, Haut-Uélé et Ituri) et, (3) l'étude sur les mobilités virtuelles, interconnectivité, durabilités et montée des discours de haine.
De la conclusion de la conférence
Le principal problème de gouvernance en RDC, c'est le problème d'hommes, dirigeants et dirigés qui sont dans un consensus parricide qui foule au pied l'intérêt général, des toutes les générations passées, présentes et à venir.
Des faits socio anthropologiques, socio-politiques et socio-économiques fonciers
Pour Michel Bisa, il s'observe dans les différentes Provinces de la RD. Congo que :
- L'État a perdu le contrôle de vastes étendues de son territoire et le monopole de la violence légale dans un contexte où nous pouvons compter plus de 207 groupes armés formels et informels, actifs et passifs, invités et agresseurs.
- Le Gouvernement de la violence a cédé le pas au "gouvernement par la violence". Or, l'historiographie de la RDC montre qu'aucun régime politique n'a su et pu se maintenir par la violence.
- En de nombreuses provinces (le deux Kivu, Maniema, Kwilu, Kwango, Ituri, les deux Uélés, Kongo central et, récemment Kinshasa), on observe un accroissement et une perpétuité des antagonismes violents relevant des régimes de conflictualité tribalo-ethnique, des situations des guerres tribales et identitaires et de la politisation des enjeux territoriaux et fonciers. Ces débats partent du bas de l'échelle sociétale (questions de Kwangolité, teke-yaka, Katanga yetu, rwandophones et congolité) jusqu'au sommet de l'État avec le projet de loi dite de la congolité ou de père et de mère- c'est le même débat, à des échelles différentes.
Ces débats favorisent les discours de haine et de ségrégations intercommunautaires et laissent craindre la possibilité d'une guerre civile, en contexte électoral et où les formes de mobilisation, de participation et de revendications politiques sont dynamiques et en mutations vers les nano structures et la virus-lisation des groupes dans les avenues des grandes villes - Les provinces sont piégées dans une décentralisation chaotique (Lire Lotoy, J-P), ce qui explique l'absence des actes de libre administration des Provinces dans plusieurs ETD.
- La mauvaise gouvernance foncière et l'absence de la gouvernance des identités criminelles facilite la criminalité organisée et le développement du terrorisme du genre inédit dans un paysage des forêts entrecoupées des montagnes aux volcans, lacs et rivières.
- La qualité et la quantité de l'information fiable est très insuffisant. L'État ne finance pas les recherches, les proposés de l'État construisent une distance avec les chercheurs en préférant les marabouts, prophètes, comédiens et autres charlatans sans expertises ;
- L'état actuel de l'État congolais suggère une analyse en terme de "chao organisé" et suggère la perpétuité de la "Vampirisation de l'État" à cause d'une gestion kleptocratique-H. Mambi et de la banalisation de l'éthique/moralité dans les conduites des affaires étatiques.
- La quasi-totalité des aires protégées est devenue le bastion des groupes armés. Certes, il existe des facteurs qui amplifient l'ingouvernabilité actuelle des Provinces et la perpétuité du cycle de vie des conflits.
De la crise de la gouvernance identitaire et des étrangers gouvernementalités collectives en l'absence d'une politique de la population dans un État de 2.345.410km
Il existe un long processus du refus étatique de gouverner les identités individuelles, de construire l'identité nationale et de contrôler contrôler la sexualité : il n'existe ni politique de la population, ni politique de la sexualité et reproduction, ni carte d'identité, ni recensement de la population, ni un système efficace d'enregistrement des naissances, des décès, des migrants, de la mobilité interne et externe, etc.
Cette carence facilite la montée du concept en émergence de rééquilibrage démographique dans le Bassin du Congo où les peuples, y compris des armées et des personnes riches, des troupeaux des Bovins,... de plus de 10 Pays viennent massivement et s'installent anarchiquement dans des contrées sous administrées.
S'agit-il du mécanisme de partage des ressources dans la sous-région et de l'accès à la congolité ? L'EAC est-elle devenue notre Pays ? Quel en est le sentiment d'appartenance ?
De l'état de l'État, des tendances générales et des perspective quant à l'avenir de l'État dans une société en crises perpétuelles
Sur le point, Michel Bisa pense que nous avançons vers la fin de l'État moderne au Congo Kinshasa. Il étale ces tendances :
- L'incapacité d'anticipation des services zaïrois face au Génocide du Rwanda en 1994 explique les affres actuels. Malheureusement, nos services de sécurité se montrent incapable de changer le destin de l'État ! Il nous faut des leaders prêt à tout pour défendre la Patrie. Ces leaders doivent être orientés par des véritables analystes, spécialisés dans tous les domaines de la vie sociétale ;
- En RDC, nous avons des contrées où la Terre appartient au Mwami, des coins où elle appartient aux clans et des coins où elle appartient aux dignitaires à travers des phénomènes d'accaparement des terres et ceux des fermes sans plantes ni élevages (terres en vastes étendues mises en jachère).
- La réforme foncière en cours, non encore aboutie, est déjà inadaptée aux gouvernementalités. Elle s'est inscrite dans énoncées du courant moderniste, pourtant l'on est en post-modernité.
Les certificats d'enregistrement individuels et collectifs, perçu comme l'outil de sécurisation foncière, se sont déjà révélés, ici même, comme des sources d'insécurité. Par ailleurs, cette réforme qui a exclue la majorité des chercheurs spécialisés (excepté deux), a reconduit des concepts eurocentriques du genre communauté locale, peuples autochtones, réfugiés climatiques, etc.
Que devrait être une introduction?
La criminalité foncière et identitaire, fait de la RD. Congo le nouvel eldorado criminel du XXIe siècle. Cet État connaît une croissance fulgurante depuis 1994, des groupes armés qui généralisent l'insécurité au point que l'État est installé en 2023, année électorale, est installé en permanence, de l'Est à l'ouest, dans une situation où s'enchevêtrent des conjonctures des "guerres" et des celles de "ni guerre ni paix" qui apparaissent comme l'aboutissement d'un long processus d'affaiblissement de l'État. Qui s’en émeut ? En tout cas, pas les services non apparents qui devraient être à la première ligne intelligent et invisible de toutes les batailles de la vie et survie étatique.
Ces constats suscitent des craintes quant à l'avenir de l'État au Congo-Kinshasa, le fantasme d'une expansion des formes rigoristes de radicalisation et morcellement de l'État, voire de l'importation du djihadisme.
Que faut-il donc de plus pour déclarer une catastrophe démocratique ? Faut-il maintenir la démocratie dans une République où le social se tait ?
S’opposer, dénoncer, critiquer, c’est déjà mériter d’être conspué, selon une nouvelle forme de sociologie militante. Qui mettra fin à ce scandale en s’attaquant frontalement à la criminalité foncière, identitaire et à la construction de la cohésion sociale, du bonheur citoyen et à la puissance de l'État dans son ensemble ?
Le jour où on aura un tel leaders, il faudra arrêter avec les élections tous les 5 ans.
Colloque de Lubumbashi- Gouvernance des Provinces en RD.Congo